RGPD : une association de consommateurs peut intenter une action représentative

Une association de défense des consommateurs peut exercer des actions représentatives contre des atteintes à la protection des données à caractère personnel, indépendamment d’un mandat qui lui aurait été conféré ou de la violation de droits concrets d’une personne concernée. Selon la Cour de justice de l’Union européenne, dans un arrêt du 28 avril 2022, « l’article 80, §2 du RGPD « ne s’oppose pas à une réglementation nationale qui permet à une association de défense des intérêts des consommateurs d’agir en justice, en l’absence d’un mandat qui lui a été conféré à cette fin et indépendamment de la violation de droits concrets des personnes concernées, contre l’auteur présumé d’une atteinte à la protection des données à caractère personnel, en invoquant la violation de l’interdiction des pratiques commerciales déloyales, d’une loi en matière de protection des consommateurs ou de l’interdiction de l’utilisation de conditions générales nulles, dès lors que le traitement de données concerné est susceptible d’affecter les droits que des personnes physiques identifiées ou identifiables tirent de ce règlement. ». La Cour précise que le fait d’habiliter une organisation de défense des droits des consommateurs à exercer une telle action représentative peut s’avérer plus efficace que le recours d’une personne concrètement affectée par une violation de ses droits et peut ainsi contribuer à renforcer les droits des personnes concernées et à leur assurer un niveau élevé de protection. Selon la Cour, une telle action permet aussi de prévenir un grand nombre de violations des droits des personnes concernées par le traitement en question.
Dans cette affaire, une association de consommateurs allemande avait intenté une action en cessation contre Meta Platforms Ireland (ex-Facebook). Elle dénonçait l’utilisation des jeux gratuits mis à disposition dans l’Espace Application qui autorise Facebook à obtenir un certain nombre de données personnelles de l’utilisateur et à procéder à la publication de son nom, de son statut, de ses photos, de ses scores, etc. L’union de consommateurs a obtenu gain de cause en première instance comme en appel mais Meta a introduit un recours contre la décision de rejet de la juridiction d’appel. La cour fédérale de justice qui avait un doute sur la recevabilité de l’action de l’union des consommateurs avait sursis à statuer et avait posé une question préjudicielle à la CJUE pour connaître son interprétation de l’article 80 § 2 qui prévoit que « les États membres peuvent prévoir que tout organisme, organisation ou association visé au paragraphe 1 du présent article, indépendamment de tout mandat confié par une personne concernée, a, dans l’État membre en question, le droit d’introduire une réclamation auprès de l’autorité de contrôle qui est compétente en vertu de l’article 77, et d’exercer les droits visés aux articles 78 et 79 s’il considère que les droits d’une personne concernée prévus dans le présent règlement ont été violés du fait du traitement. ».

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Expertise judiciaire : la charge de la preuve des griefs

Dans un arrêt du 5 avril 2022, la cour d’appel de Poitiers a estimé qu’« il n’y a pas lieu de faire peser sur le demandeur à une expertise judiciaire la charge de la preuve du fait que la mesure demandée a précisément pour objet de rapporter ». Elle répond au prestataire informatique qui considérait qu’il appartenait à l’utilisateur de justifier, dans le cadre de l’expertise, que les prestations fournies n’étaient pas conformes aux engagements contractuels. Le demandeur faisait valoir sa position de profane en informatique et la complexité technique du projet qui lui aurait demandé un investissement dans la production disproportionnée d’un dossier de griefs.
Un prestataire avait été sélectionné suite à un appel d’offres pour le remplacement d’un ERP. Dans le cadre de la mise en production du progiciel, le client a exprimé son inquiétude relative à la bonne mise en place des échanges de données informatisées (EDI) et sur la capacité du prestataire à mener ce projet. Pour assurer pleinement sa mission, ce dernier lui a demandé de mieux exprimer ses besoins. Le client mécontent de l’évolution du projet a assigné devant le tribunal de commerce son prestataire et le crédit-bailleur pour qu’il ordonne une expertise judiciaire. Ce qui fut accordé par une ordonnance de référé du 7 juin 2021, dans le cadre de l’article 145 du CPC. La seule preuve qui incombe au demandeur à la mesure technique, rappelle la cour, est celle « de l’existence d’un litige potentiel sur la solution duquel les faits dont la preuve est recherchée doivent être de nature à avoir de l’influence ». La cour estime que l’utilisateur a rapporté cette preuve, celle du motif légitime à recourir à une mesure technique.

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Appels anonymes : identification du titulaire d’un n° de téléphone

Par une ordonnance de référé du 5 avril 2022, le tribunal judiciaire de Paris a ordonné à l’opérateur Lebara France Limited de communiquer l’ensemble des données qu’il détient permettant l’identification du titulaire d’un numéro de téléphone qu’il gère. Concernant cette demande fondée sur l’article 145 du code de procédure civile, le tribunal a estimé qu’elle était proportionnée aux intérêts antinomiques en présence et notamment du droit de la preuve de la victime. En l’espèce, un plombier avait perdu sa sacoche contenant ses papiers d’identité. Suite à cela, il a reçu de nombreux appels masqués, des messages sur Facebook, des emails le menaçant et lui réclamant le versement d’importantes sommes d’argent. Par des recherches sur le site de l’Arcep, il est apparu que le numéro de téléphone était géré par Lebara. Pour autoriser la communication des données par l’opérateur, le juge a vérifié que la mesure demandée était nécessaire à l’exercice du droit à la preuve du requérant et proportionnée aux intérêts en présence.

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Le client tenu de vérifier l’adéquation du progiciel à ses besoins

Dans le cadre de la fourniture d’un ERP et de la vente d’un matériel informatique financé par un contrat de leasing, le tribunal judiciaire de Strasbourg rappelle que le client est tenu de vérifier l’adéquation du progiciel à ses besoins. Par un jugement du 8 avril 2022, il a condamné le client à payer les sommes dues au titre des loyers échus impayés et de l’indemnité de résiliation mais aussi à restituer le matériel objet d’une location longue durée.
L’opération comprend trois contrats : un contrat de fourniture de progiciel, un contrat de vente de matériel et un contrat de location financière pour ce matériel. Ces contrats sont interdépendants et la résiliation de l’un entraîne la caducité des autres. Cette interdépendance justifie le droit pour le locataire d’opposer une exception d’inexécution si le fournisseur ne remplit pas ses obligations. Or, en l’espèce le client ne justifie pas de manquements de son fournisseur à son obligation de conseil s’agissant des logiciels ni à son obligation d’information. Le client, quant à lui, est tenu de vérifier l’adéquation des progiciels à ses besoins. Ce dernier utilisait ce genre de logiciel depuis une dizaine d’années et ce n’est que tardivement qu’il a fait connaître ses griefs.

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Emmanuelle : primauté du droit d’informer sur le droit d’auteur

« La condamnation de la SAS Marie Claire Album au paiement de dommages et intérêts pour réparer le préjudice subi par M. X ne se réclamerait d’aucune nécessité, ne répondrait pas à un besoin social impérieux de protection du droit d’auteur, constituerait une atteinte disproportionnée à sa liberté d’expression et serait, partant, contraire à l’article 10 de la CESDH ». Dans son jugement du 31 mars 2022, le tribunal judiciaire de Nanterre a ainsi rejeté les demandes de l’auteur de la photographie montrant Sylvia Kristel dans un fauteuil en rotin et qui avait servie à la promotion du film Emmanuelle, réalisé par Just Jaeckin.
Le photographe reprochait au site Staragora.com d’avoir reproduit et diffusé cette photo sans son autorisation ni mention de son nom, à l’occasion du décès de Sylvia Kristel en 2012. Si la matérialité de la contrefaçon n’a pas été contestée, le débat s’est porté sur l’exercice de la liberté d’expression de l’éditeur et de l’atteinte éventuelle disproportionnée que lui causerait une condamnation pour contrefaçon. Pour résoudre cette équation, le tribunal a procédé à un contrôle de conventionnalité des dispositions internes opposées et s’est assuré que la reconnaissance des droits du photographe ne constituerait pas une ingérence disproportionnée a but légitime reconnu par l’article 10.2 de la convention européenne des droits de l’homme.
Le tribunal commence par évoquer le fait que la page en question, sur un site désormais inexistant, a été diffusée pendant six ans mais n’a été consultée que 76 fois, et que le cliché a servi d’illustration pour un article sur le décès de la comédienne. Le tribunal en conclut que « si l’information portée à la connaissance du public par le truchement nécessaire de la reproduction de l’œuvre en débat n’est pas d’une importance majeure pour le débat public et ne mérite pas le niveau de protection accordée à l’expression et au discours politiques, l’intensité de l’atteinte au droit d’auteur de M. X est à ce point faible que la restriction à l’exercice de la liberté d’expression de la SAS Marie Claire Album qu’engendrerait une condamnation ne se justifie par aucun besoin social impérieux ». Et surabondamment, le tribunal considère que « même dans le cadre d’une mise en balance, les demandes de M. X auraient, dans ces circonstances particulières, été rejetées, rien ne justifiant concrètement que, en l’absence d’atteinte autre que de principe à un droit d’auteur à l’endroit duquel son titulaire a manifesté une certaine distance tant dans ses délais d’action que dans ses propos publics, le droit de propriété prime la liberté d’expression exercée pour traiter un évènement d’actualité ».

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Le cloud est un support soumis à la redevance pour copie privée

Dans un arrêt du 24 mars 2022, la Cour européenne de l’Union européenne estime que « l’expression « reproductions effectuées sur tout support », […], couvre la réalisation, à des fins privées, de copies de sauvegarde d’œuvres protégées par le droit d’auteur sur un serveur dans lequel un espace de stockage est mis à la disposition d’un utilisateur par le fournisseur d’un service d’informatique en nuage ». Elle a ainsi interprété l’article 5, paragraphe 2, sous b) de la directive du 22 mai 2001, sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information
Dans cette affaire, un fournisseur de service de stockage dans le cloud était en litige avec la société de gestion collective autrichienne des droits d’auteur au sujet de la rémunération due au titre du droit d’auteur. Le fournisseur de solutions cloud affirmait s’être déjà acquitté en Allemagne, où ses serveurs sont hébergés, de la redevance imposée au titre du droit d’auteur, cette redevance ayant été intégrée au prix de ces serveurs par le fabricant ou l’importateur de ceux-ci. Il a ajouté que les utilisateurs situés en Autriche avaient également payé une redevance pour la réalisation de copies privées sur les appareils terminaux nécessaires pour charger des contenus dans le cloud. Le tribunal de commerce de Vienne a donné gain de cause au fournisseur de cloud mais le tribunal régional supérieur a sursis à statuer et a posé deux questions préjudicielles à la CJUE.
Le tribunal a d’abord demandé à la Cour d’interpréter la notion « de tout » support » qui figure à l’article 5, paragraphe 2, sous b) de la directive du 22 mai 2001. Celui-ci dispose que les États membres ont la faculté de prévoir des exceptions ou limitations au droit de reproduction « lorsqu’il s’agit de reproductions effectuées sur tout support par une personne physique pour un usage privé et à des fins non directement ou indirectement commerciales, à condition que les titulaires de droits reçoivent une compensation équitable qui prend en compte l’application ou la non-application des mesures techniques visées à l’article 6 aux œuvres ou objets concernés ». La Cour commence par indiquer que l’expression « reproduction » doit être entendue au large, prenant en compte le fait que les actes couverts par le droit de reproduction bénéficient d’une définition large pour assurer la sécurité juridique au sein du marché intérieur. Elle ajoute que le droit de reproduction découle également de l’objectif principal de la même directive, qui est d’instaurer un niveau de protection élevé en faveur, notamment, des auteurs. Pour ce qui est de la notion de « tout support », la Cour rappelle que peu importe qu’un « espace de stockage mis à la disposition de l’utilisateur par un fournisseur d’un service de cloud pour la réalisation d’une copie » ne soit pas défini par la directive et ne comporte pas de renvoi au droit des Etats membres pour en définir la portée. Il est, en effet, de jurisprudence constante que la Cour « doit trouver, dans toute l’Union, une interprétation autonome et uniforme qui doit être recherchée en tenant compte non seulement des termes de la disposition concernée, mais également de son contexte et de l’objectif poursuivi par la réglementation dont cette disposition fait partie ». Au vu des textes, elle affirme donc que la directive est susceptible de s’appliquer à des reproductions effectuées par une personne physique à l’aide d’un dispositif qui appartient à un tiers, sur tout support. Elle rappelle aussi que la directive « vise à créer un cadre général et souple au niveau de l’Union pour favoriser le développement de la société de l’information et à adapter et à compléter les règles actuelles en matière de droit d’auteur et de droits voisins pour tenir compte de l’évolution technologique, qui a fait apparaître de nouvelles formes d’exploitation des œuvres protégées ».
Dans sa seconde question, le tribunal voulait que la Cour se détermine sur le fait de savoir si cette disposition de la directive s’oppose à ce qu’une réglementation n’assujettisse pas les fournisseurs de services de stockage dans le cadre de l’informatique en nuage au paiement d’une compensation équitable. Et la Cour a répondu qu’elle ne s’y oppose « au titre de la réalisation sans autorisation de copies de sauvegarde d’œuvres protégées par le droit d’auteur par des personnes physiques, utilisatrices de ces services, pour un usage privé et à des fins non directement ou indirectement commerciales, pour autant que cette réglementation prévoie le versement d’une compensation équitable au bénéfice des titulaires de droits ».

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Facta : effacement des données d’un client indûment transférées aux USA

Par un jugement du 7 février 2022, le tribunal judiciaire de Grenoble a ordonné à la Banque Rhône-Alpes de faire toutes diligences à ses frais auprès des autorités fiscales des Etats-Unis afin qu’elles procèdent à l’effacement total de ses déclarations Facta antérieures à 2017 impliquant à tort son client, sous astreinte de 1.500 € par jour de retard. Il condamne la banque à verser 15.000 euros de dommages et intérêts à cet homme indûment inscrit dans le traitement lié aux déclarations Facta, le Foreign Account Tax Compliance Act qui oblige les établissements bancaires du monde entier à déclarer aux autorités fiscales des Etats-Unis tout client considéré comme contribuable américain. Le tribunal a également ordonné l’exécution provisoire de la décision, eu égard à l’ancienneté et aux circonstances de cette affaire. Une ordonnance de référé du 4 juillet 2018 du TGI de Grenoble, confirmée en appel le 3 octobre 2019, avait déjà ordonné à la Banque Rhône-Alpes l’effacement total de toutes les données personnelles du client figurant par erreur dans ce traitement.
Tout a commencé par une erreur de la banque concernant le lieu de naissance de son client. Un Français né à Ottawa, capitale du Canada, avait reçu un courrier de sa banque, la Banque Rhône-Alpes, lui demandant de confirmer qu’il présentait bien des critères d’« américanité », en raison de son lieu de naissance et l’informant qu’elle déclarait donc l’existence de son compte aux autorités fiscales américaines. Le client a téléphoné à sa banque pour lui confirmer qu’il était né à Ottawa, au Canada. Malgré cette démarche, la banque a maintenu sa déclaration outre-Atlantique. Il a ensuite demandé la rectification de cette erreur par la banque qui s’y est opposée, affirmant qu’il existe des villes du nom d’Ottawa aux Etats-Unis et que le client ne justifiait pas ne pas y être né. Finalement, et après fourniture d’un extrait de naissance, la banque s’est exécutée pour 2017, mais pas pour les années antérieures.
En exécution de l’ordonnance de référé, la banque a adressé à la DGFip de Bercy une simple déclaration rectificative mais ne s’est pas adressée aux autorités américaines. Cette démarche a eu pour effet une rectification de l’inscription mais pas son effacement, ce qui ne produit pas les mêmes effets, notamment en termes de trace. Dans son jugement, le tribunal a donc ordonné cet effacement sur le fondement de l’article 17 du RGPD. Selon le tribunal, « la banque, professionnelle du droit et particulièrement tenue à ce titre d’un devoir de vigilance, ne pouvait ignorer que le droit à l’effacement est un droit reconnu tant par la législation française que par les textes et la jurisprudence européennes et ne pouvait ignorer les contraintes particulières attachées d’une part à la transmission de données vers un Etat n’appartenant pas à l’union européenne et d’autre part à l’exercice du droit d’effacement pour les traitements mis en œuvre par les administrations publiques. ».
Par ailleurs, le tribunal a rappelé que si, en vertu de l’accord Facta, les déclarations rectificatives auprès du fisc américain sont opérées par la DGFip, rien n’interdit à la banque d’effectuer directement cette démarche. Le tribunal a considéré que l’absence de démarches de la banque malgré les décisions en référé justifiait de prononcer des astreintes.
Par ailleurs, le client de la banque a fait l’objet d’une autre inscription au Facta par une société du groupe bancaire. En effet, la banque se réserve le droit de communiquer les données personnelles de ses clients aux sociétés du groupe mais aussi aux partenaires. Mais elle a refusé de transmettre la demande de son client aux entités du groupe concernant l’erreur sur son américanité. Le tribunal lui a ordonné de leur communiquer le jugement et l’alerte de ne pas l’inscrire au traitement Facta.
Le tribunal a condamné la banque à verser 15 000 € à son client pour la réparation de son préjudice moral. Il a pris en considération le fait que la déclaration au Fatca lui a causé un préjudice par l’inquiétude qu’il a pu légitimement ressentir non seulement lors des passages aux frontières US mais également quant à l’éventualité d’une poursuite par le fisc américain. En effet, il peut craindre d’être recherché ou poursuivi par les autorités fiscales américaines pour les années antérieures à 2017 d’autant qu’il apparaît que l’application de la loi fiscale américaine peut être rétroactive.

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Une cession de droits de PI à titre gratuit est une donation

Le tribunal judiciaire de Paris vient de lancer un pavé dans la mare en jugeant qu’une cession à titre gratuit de droits de propriété intellectuelle constitue une donation, qui doit être passée devant notaire. Dans son jugement du 8 février 2022, le tribunal conclut à la nullité de l’acte de cession en cause, contracté sous seing privé.
Deux personnes avaient conçu des antennes permettant la réception de données de balises placées dans les colliers de chiens de chasse. Ils ont déposé ensemble une marque de l’Union européenne semi-figurative et des dessins ou modèles communautaires. Ces produits étaient distribués par deux sociétés dont ils étaient associés et aussi par la société Hermès I distribution dont un seul des deux partenaires était associé et gérant. Les titres de propriété intellectuelle ont été cédés à Hermès I et son gérant a aussi concédé une licence sur les marques ou modèles à deux autres sociétés. Son ex-associé a cependant « dénoncé » la cession des droits de propriété intellectuelle et a assigné son ex-partenaire en nullité du contrat de cession. Il a invoqué le fait que la cession étant consentie sans contrepartie financière, l’acte s’analyse donc comme une donation qui doit être consentie par un acte authentique. Le tribunal a approuvé cet argument. Il rappelle qu’aux termes de l’article 931 du code civil, une donation entre vifs doit passer devant notaire sous la forme ordinaire des contrats. Le code la propriété intellectuelle ne déroge pas à cette condition formelle des donations.

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Saisie : rétractation d’une ordonnance pour défaut de motif légitime

Par un arrêt du 8 février 2022, la cour d’appel de Pau a ordonné la rétractation de l’ordonnance sur requête portant sur une saisie, pour défaut de motif légitime, condition de validité imposée par l’article 145 du code de procédure civile. La cour a estimé que le juge qui l’avait autorisée n’a pas vérifié si l’ensemble des conditions étaient réunies. La rétractation a été jugée prononcée alors que la saisie avait déjà été effectuée. La Cour a donc exigé que les copies et les procès-verbaux soient restitués aux sociétés concernées et que les copies numériques des fichiers saisies soient complètement effacées et les procès-verbaux attestant de cette suppression leur soient remis.
Cette affaire complexe concerne une société qui avait acquis les droits de propriété intellectuelle sur trois logiciels appartenant à trois sociétés différentes. Diverses clauses de non-concurrence avaient été signées avec les partenaires concernés. Pour décider de la rétractation de l’ordonnance, la cour a, d’une part, estimé que les faits reprochés de concurrence déloyale de certains des partenaires ne reposaient sur aucun élément objectif communiqué à la cour. D’autre part, « sauf à faire produire à la clause de confidentialité pesant sur les autres prestataires de la société Sivan Innovation Ltd, les effets d’une clause de non-concurrence, le seul constat de leur participation commune à des sociétés créées dans le même secteur d’activité ou dans un secteur d’activité voisin, et leur collaboration avec la société Betterise Technologies ne suffisent pas à caractériser les éléments plausibles d’une concurrence déloyale, de nature à justifier les mesures très générales ordonnées en application de l’article 145 du code de procédure civile ».

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Hameçonnage : condamnation pour complicité d’escroquerie

Une fois n’est pas coutume, une affaire d’hameçonnage a été élucidée, quoique partiellement, et a conduit à la condamnation d’une des protagonistes, une complice mais pas les instigateurs du réseau. Celle-ci avait reçu 378 mandats représentant plus de 124 000 € dont près de 97 000 € avaient été transférés au Bénin. Par un jugement du 20 janvier 2022, le tribunal judicaire de Nantes a condamné pour complicité d’escroquerie et abus de bien social la femme qui servait d’intermédiaire en France. Elle écope d’une peine d’un an de prison avec sursis, ainsi que d’une interdiction d’exercer une profession commerciale ou de diriger une entreprise. Elle doit en outre verser 7 500 € aux parties civiles à titre de réparation, dont 2 000 € à Groupama dont le nom a été usurpé.
Dans le cadre d’un réseau d’escroquerie, des individus proposaient sur internet des emprunts, sans fourniture de justificatifs. Pour confirmer le contrat, ils demandaient le versement de divers frais sous forme de transfert d’espèces : une fois le paiement reçu, ils réclamaient des paiements supplémentaires pour poursuivre la transaction, mais la somme promise n’était jamais débloquée. La personne qui a été jugée dans cette affaire avait elle-même été victime de cette escroquerie. Elle avait reçu un email qui lui proposait des prêts sans passer par une banque et sans justificatifs. Comme son salon de coiffure se trouvait en difficulté, elle a cédé à la tentation et a demandé un prêt de 30 000 €. Son contact lui a demandé de verser 218 € pour frais de dossier, puis cinq mandats pour un total de 1 800 €. Comme elle n’arrivait plus à payer, le contact lui a proposé de recevoir des sommes de Western Union ou des mandats cash et de les lui reverser. Elle a accepté de participer à cette opération, espérant voire son prêt débloqué. Elle finira par comprendre, trop tard, qu’elle était le maillon d’une escroquerie quand une de ses cibles l’a contactée et lui a demandé à être remboursée.
Groupama avait constaté qu’une femme sur sa page Facebook prétendait être membre de la direction de cette mutuelle et qu’elle y annonçait des prêts à retirer auprès de Western Union. Elle a donc adressé une notification au réseau social demandant de retirer la page en question et de conserver les éléments d’identification. Quelques mois plus tard, le directeur de Tracfin signalait que cette femme avait été destinataire de plus de 124 000 € et avait transmis au Bénin plus de 97 000 € de mandats cash postaux et mandats Western Union vers quatre destinataires.

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