Contrefaçon de logiciel : condamnation pour procédure abusive
Attaquer en justice pour contrefaçon de logiciel et concurrence déloyale un concurrent, sans pouvoir démontrer ses accusations et en communiquant sur ces affirmations alors qu’elles n’avaient été confirmées par le tribunal peut coûter cher. Par un jugement définitif du 25 novembre 2022, le tribunal judiciaire de Paris a condamné cette société à verser 100 000 € de dommages-intérêts à la société attaquée indûment pour concurrence déloyale, 20 000 € pour procédure abusive et 40 000 € au titre de l’article 700 du CPC.
La société Clecim accusait la société Deepgray Vision d’avoir commis des faits de contrefaçon de son logiciel lors des opérations de maintenance qu’elle a réalisées en novembre 2014 chez un client. Elle prétendait que Deepgray Vision avait utilisé le code
source de son logiciel XLine à cette occasion, et ainsi contrefait ses droits d’auteur sur ce logiciel ainsi que ses marques XLine et SIAS. Deepgray Vision a été créée le 20 janvier 2012 par trois personnes qui avaient été salariées de Clecim jusqu’au 9 septembre 2011 et qui avaient travaillé sur ces logiciels. Clecim a obtenu deux ordonnances en saisie-contrefaçon et a assigné son concurrent pour faire interdire la reproduction non autorisée la mise à jour de son logiciel XLine et la reproduction non autorisée de ses marques,
Sur la contrefaçon, le tribunal a commencé par considérer que Clecim ne démontrait pas être titulaire des droits d’auteur sur le logiciel à la date des faits litigieux, en raison notamment de l’apposition sur celui-ci d’un copyright © désignant une autre société. De toute façon, le tribunal a conclu à l’absence de contrefaçon du logiciel. D’une part, Clecim ne s’était pas réservée par contrat la maintenance corrective de son logiciel, le client était donc en droit de faire réaliser cette maintenance par Deepgray Vision. Et puis Clecim ne prouve pas que cette intervention impliquait le recours aux codes sources du logiciel litigieux. D’autre part, le tribunal a estimé que Deepgray Vision avait développé sa propre solution logicielle d’inspection de surface dont l’originalité et le caractère innovant sont corroborés par l’expert en informatique ayant assisté l’huissier pendant la saisie-contrefaçon et par l’éligibilité de cette société au statut de jeune entreprise innovante et au crédit d’impôt recherche.
Si Clecim échoue à prouver les faits de concurrence déloyale de Deepgray Vision, elle est en revanche condamnée à indemniser la défenderesse pour des actes de concurrence déloyale par dénigrement par la présentation, comme acquis en justice, à plusieurs clients communs, du principe d’une contrefaçon sur la base de simples ordonnances de saisie-contrefaçon. Le tribunal conclut à l’intention de nuire de Clecim contre Deepgray Vision et au détournement du but de l’action en justice, faisant dégénérer en abus son droit d’agir.
Enfin, le tribunal annule les marques SIAS pour défaut de distinctivité et juge que Deepgray Vision n’a pas contrefait les marques XLine car l’usage qu’elle en a fait était nécessaire pour désigner le logiciel en cause.