Escroqueries sur Abritel.fr : le site responsable en tant qu’éditeur
Par une décision du 21 février 2023, le tribunal judiciaire de Paris a considéré que « la société Homeawayuk Limited ne saurait prétendre avoir exercé, dans l’exploitation de la plate-forme abritel.fr, le rôle d’un hébergeur purement passif, dont la conséquence aurait été une responsabilité civile limitée. Il y a lieu en l’espèce d’envisager la responsabilité de la société selon les critères de la responsabilité contractuelle de droit commun ». Après avoir procédé à l’analyse des faits reprochés par 67 plaignants, utilisateurs de la plateforme victimes d’une escroquerie, le tribunal a estimé que la société éditrice d’Arbritel.fr n’était pas exempte de toute responsabilité, même si les demandeurs ont participé largement à leur préjudice par des comportements imprudents. Il estime donc la part de préjudice correspondant à la responsabilité de la société à 40 % du montant des sommes payées par les demandeurs aux faux propriétaires.
67 utilisateurs de la plateforme avaient effectué des réservations de location à partir d’annonces figurant sur le site qui invitaient les intéressés à entrer directement en contact avec le prétendu propriétaire via l’adresse email affichée sur l’annonce. L’annonce en question figurait sur un encadré apparemment ajouté par incrustation sur les pages du site consultable par les vacanciers, dans un emplacement réservé à une photo. Les plaignants considérant qu’Abritel portait une responsabilité manifeste pour les escroqueries dont ils ont été victimes l’ont assignée en responsabilité et ont chacun respectivement réclamé entre 1 000 et 6 000 € pour l’indemnisation du préjudice subi.
Le tribunal a commencé par se prononcer sur le statut d’éditeur d’Arbitel.fr en estimant que la plateforme prenait une part active dans la diffusion des annonces, notamment en validant l’inscription des propriétaires, en fixant le contenu des annonces, en se réservant le droit discrétionnaire d’évaluer la pertinence des annonces publiées par rapport aux conditions générales, etc. Le tribunal a ensuite recherché si le site avait commis une faute. S’il a considéré que les escroqueries n’avaient pas pour origine une faute ou un dysfonctionnement du site, il a mis en cause sa responsabilité en raison de ses ambiguïtés. Il a constaté par exemple qu’aucun avertissement général ne figurait sur le site pour mettre en garde l’utilisateur sur les risques de parasitage de contenus ou que les éléments d’information publiés n’étaient pas mis en exergue ou étaient mélangés à des informations diverses. Même la garantie était formulée de manière ambiguë constate le tribunal qui juge que la responsabilité civile du site est engagée.