Expertise judiciaire : la charge de la preuve des griefs
Dans un arrêt du 5 avril 2022, la cour d’appel de Poitiers a estimé qu’« il n’y a pas lieu de faire peser sur le demandeur à une expertise judiciaire la charge de la preuve du fait que la mesure demandée a précisément pour objet de rapporter ». Elle répond au prestataire informatique qui considérait qu’il appartenait à l’utilisateur de justifier, dans le cadre de l’expertise, que les prestations fournies n’étaient pas conformes aux engagements contractuels. Le demandeur faisait valoir sa position de profane en informatique et la complexité technique du projet qui lui aurait demandé un investissement dans la production disproportionnée d’un dossier de griefs.
Un prestataire avait été sélectionné suite à un appel d’offres pour le remplacement d’un ERP. Dans le cadre de la mise en production du progiciel, le client a exprimé son inquiétude relative à la bonne mise en place des échanges de données informatisées (EDI) et sur la capacité du prestataire à mener ce projet. Pour assurer pleinement sa mission, ce dernier lui a demandé de mieux exprimer ses besoins. Le client mécontent de l’évolution du projet a assigné devant le tribunal de commerce son prestataire et le crédit-bailleur pour qu’il ordonne une expertise judiciaire. Ce qui fut accordé par une ordonnance de référé du 7 juin 2021, dans le cadre de l’article 145 du CPC. La seule preuve qui incombe au demandeur à la mesure technique, rappelle la cour, est celle « de l’existence d’un litige potentiel sur la solution duquel les faits dont la preuve est recherchée doivent être de nature à avoir de l’influence ». La cour estime que l’utilisateur a rapporté cette preuve, celle du motif légitime à recourir à une mesure technique.