Logiciel : cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle
Sur renvoi d’un arrêt de la Cour de cassation, la cour d’appel de Paris a prononcé, dans un arrêt du 15 janvier 2021, la résiliation de deux contrats aux torts des deux sociétés du groupe Arcelor, au titre de la responsabilité contractuelle d’Arcelor MP sur le contrat de licence et de maintenance, et de celui de la responsabilité délictuelle d’Arcelor France pour rupture brutale du contrat de services. Comme le prescrit la cour suprême, la cour d’appel n’a pas appliqué le principe de non-cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle, au motif qu’il s’agissait de sociétés distinctes. Les sociétés Arcelor ont été condamnées in solidum à verser plus d’un million d’euros au titre de la licence d’utilisation, 50 000 € au titre de la rupture brutale de la relation contractuelle établie, 15 000 € en réparation du préjudice moral et 40 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La Société Data Dynamics (DDS) est un éditeur de logiciel qui a conclu deux contrats avec deux entités juridiques distinctes du groupe Arcelor Mittal : un contrat de licence et maintenance signé par Arcelor MP pour la concession du droit d’utilisation de son progiciel Shipper et un contrat de services signé par Arcelor France pour le paramétrage et le déploiement du progiciel adapté, sur plusieurs sites en Europe. A la suite d’une étude comparative de solutions logicielles, au bout de quelques mois, Arcelor a notifié la résiliation des deux contrats par une seule lettre de résiliation, sans faire état de préavis. Pour la licence d’utilisation, le préavis au contrat a été respecté, celle-ci étant annuelle, et elle se terminait à son terme, mais elle comportait un engagement d’Arcelor de 5 ans. Le contrat de service prenait fin suite à la réception de notification, puisque tout passait par des bons de commande.
Dans un premier arrêt du 15 septembre 2017, la Cour d’appel de Paris a débouté DDS pour atteinte au principe de non-cumul des responsabilités, car les contrats avaient été résiliés par une seule lettre, donc un seul fait générateur, à savoir la lettre de résiliation qui visait l’ensemble des contrats en cours, pour une rupture brutale sur le terrain délictuel et abusive sur le terrain contractuel. La Cour de cassation a cassé cette décision par un arrêt du 26 juin 2019. Elle estime « qu’en statuant ainsi, tout en constatant que la société DDS invoquait un fondement contractuel pour ses demandes au titre du contrat de licence conclu avec la société Arcelor MP, et un fondement délictuel au titre de la rupture brutale de la relation commerciale établie qu’elle avait nouée dans le cadre du contrat de services conclu avec la société Arcelor France, de sorte que le principe du non-cumul ne trouvait pas à s’appliquer, s’agissant de défendeurs distincts, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».
Dans la logique de la Cour de Cassation, la cour d’appel a prononcé, le 15 janvier 2021, la résiliation des deux contrats aux torts exclusifs des deux sociétés Arcelor. Celles-ci font des critiques générales à DDS sans caractériser les carences de DDS sur la qualité du développement ou la qualité des spécifications de l’application logicielle fournis, se montrant ainsi incapables de fournir la preuve des éléments motivant la résiliation.