Ni contrefaçon ni parasitisme pour une reprise partielle de « c’est la ouate » par la Maaf
Par un jugement du 21 janvier 2022, le tribunal judiciaire de Paris a jugé que la nouvelle publicité de la Maaf diffusée sur Youtube, dont les personnages entonnent « Rien à faire, c’est la Maaf qu’il préfère ! » et « C’est la Maaf que je préfère! », sans chanter l’air ou reprendre entièrement le texte de la chanson dont il s’inspire, ne constitue pas une contrefaçon ni un acte de parasitisme.
On se souvient de la chanson « C’est la ouate » interprétée en 1986 par Caroline Loeb dont elle est co-auteure et qui a été reprise dans la publicité de la Maaf dès 2004. Par contrat du 23 mars 2004, Universal Music Publishing avait consenti à l’ancien agent publicitaire de la Maaf l’autorisation sous conditions, de réenregistrer en l’adaptant, la chanson « C’est la ouate » à des fins publicitaires. Après deux renouvellements, ce contrat a pris fin le 11 mars 2019.
Le 26 décembre 2017, la Maaf a mis en ligne sur sa chaîne Youtube une vidéo présentant au public sa nouvelle saga publicitaire intitulée « Qui peut concurrencer la Maaf ? », dans laquelle ses nouveaux personnages jouent des saynètes qui se concluent toujours par la réplique suivante : « Rien à faire, c’est la Maaf qu’il (elle) préfère ! ». Le compositeur et les deux co-auteurs ont considéré que par ses caractéristiques, celle-ci constituait une adaptation non autorisée du refrain de leur œuvre et ce, malgré l’absence de reprise de la musique. Et ils ont assigné la Maaf en contrefaçon et parasitisme.
Après avoir confirmé l’originalité de la chanson, les juges ont procédé à une analyse comparative de la chanson et du dernier spot publicitaire pour déterminer une éventuelle contrefaçon. Ils ont constaté que seule la chute de la phrase avait été conservée, c’est-à-dire le verbe « préférer » conjugué à la première ou à la troisième personne du singulier. Ils ont rejeté les demandes en contrefaçon estimant que « cette seule reprise ne peut être considérée comme la contrefaçon de l’expression litigieuse dans sa combinaison originale, dès lors qu’aucune autre des caractéristiques revendiquées n’a été utilisée ».
Ils ont également considéré que ce comportement constituait un agissement parasitaire visant à entretenir un risque de confusion dans l’esprit du public, lequel serait maintenu dans l’idée que la Maaf continue d’exploiter la chanson litigieuse. Le tribunal commence par rappeler que l’existence d’acte distincts de ceux qui fondent l’action en contrefaçon n’est pas requise en matière de parasitisme et qu’ils ne nécessitent pas, comme en matière de concurrence déloyale, que soit établi un risque de confusion auprès du public concerné.
Puis le tribunal admet que la reprise de la phrase « Y’a rien à faire c’est la Maaf qu’il/elle préfère » traduit la volonté de maintenir le lien avec la campagne précédente, dont il n’est pas contesté qu’elle a grandement participé au succès des services proposés par la Maaf. Mais ce seul slogan toutefois ne peut, en l’absence d’association avec la mélodie, être considéré comme une valeur économique attribuable aux auteurs de la chanson. Ensuite, il constate que « la notoriété de ce slogan, qui justifie sa reprise au sein de la nouvelle campagne publicitaire de la Maaf, est le fruit de ses propres investissements et non de ceux des auteurs, ce qui ne peut être contesté au vu des campagnes publicitaires massives de la demanderesse. Enfin, loin de traduire la volonté de la MAAF de se mettre dans le sillage de la chanson « C’est la ouate », le changement d’univers de sa campagne publicitaire au profit d’une parodie de films d’espionnage traduit au contraire la recherche d’un nouveau positionnement visant à s’en écarter ». Les demandes fondées sur le parasitisme sont également rejetées.