Pas d’effacement du registre des baptêmes au nom du RGPD
Un catholique qui voulait demander à se faire « débaptiser » et obtenir son retrait du registre des baptêmes s’est confronté au refus de l’Eglise qui considère qu’un baptême ne peut s’effacer, ou se « retirer ». Elle préfère mentionner en face de son nom que l’intéressé a « renié son baptême », tout en maintenant la ligne qui le concerne. Cette position n’est pas contraire au RGPD, selon le Conseil d’Etat. Dans sa décision du 2 février 2023, il a estimé qu’il « n’existe pas de motif légitime impérieux pour le traitement prévalant sur ses intérêts et ses droits et libertés, l’intérêt qui s’attache, pour l’Eglise catholique, à la conservation des données personnelles relatives au baptême figurant dans le registre, [qui] doit être regardé comme un motif légitime impérieux, prévalant sur l’intérêt moral du demandeur à demander que ces données soient définitivement effacées, eu égard, d’une part, à l’objet du registre des baptêmes et aux conditions dans lesquelles il est susceptible d’être consulté […], ainsi que, d’autre part, à la faculté ouverte à toute personne baptisée de faire apposer sur le registre une mention faisant état de sa décision de renoncer à tout lien avec la religion catholique.»
Un homme avait déposé une plainte auprès de la Cnil relative au refus opposé par l’association diocésaine d’Angers de faire droit à sa demande d’effacement et d’opposition au traitement de ses données. Par un courrier en date du 2 décembre 2021, la présidente de la Cnil l’avait informé de la clôture de sa plainte. Elle avait considéré que l’intéressé ne pouvait se prévaloir d’aucun des motifs d’effacement mentionnés au paragraphe 1 de l’article 17 du RGPD et que l’apposition en marge du registre d’une mention selon laquelle le baptisé ne reconnaissait pas la valeur de son baptême pouvait être regardée comme satisfaisant à l’exercice de son droit d’opposition fondé sur le paragraphe 1 de l’article 21 du RGPD. Cette décision de la Cnil a fait l’objet d’un recours en annulation pour excès de pouvoir devant le Conseil d’Etat.
Le Conseil d’Etat, qui a approuvé le raisonnement de la Cnil, commence par rappeler que les registres des baptêmes tenus par l’Eglise catholique sont destinés à conserver la trace d’un événement qui, pour elle, constitue l’entrée dans la communauté chrétienne. Et l’effacement définitif de l’enregistrement du baptême pourrait poser un problème si l’intéressé souhaitait réintégrer la communauté chrétienne et notamment se marier religieusement. Il juge ensuite que la mention de ses données personnelles sur le registre des baptêmes, relatives à l’état civil, à la filiation et aux coordonnées de la personne baptisée ne constitue pas un traitement illicite au regard des dispositions du d) du paragraphe 2 de l’article 9 du RGPD et que la conservation des données ainsi collectées durant une période ne s’achevant qu’après le décès de la personne concernée est nécessaire au regard des finalités de ce traitement. Il ne peut donc être fait droit à une demande d’effacement de ces données sur le fondement des dispositions des a) ou d) du paragraphe 1 de l’article 17 du RGPD. En outre, dès lors que la mention de ces données personnelles sur le registre des baptêmes n’est pas fondée sur le consentement de la personne baptisée au sens du a) du paragraphe 1 de l’article 6 de ce règlement, cité au point 5, notion reprise au a) du paragraphe 2 de l’article 9 du même texte, il ne peut davantage être fait droit à une demande d’effacement de ces données sur le fondement des dispositions du b) du paragraphe 1 de l’article 17 du RGPD relatives au retrait du consentement. Enfin, le Conseil d’Etat considère que le droit d’opposition prévu par l’article 21 du RGPD pouvait être satisfait, eu égard à la nature du registre des baptêmes tenu par l’Eglise catholique, par l’ajout d’une mention, en marge de ce registre, exprimant la volonté de l’intéressé de renoncer à tout lien avec l’Eglise catholique.