Vidéosurveillance des salariés : utilisation d’une preuve illicite sous conditions

« L’illicéité d’un moyen de preuve, au regard des dispositions susvisées, n’entraîne pas nécessairement son rejet des débats, le juge devant apprécier si l’utilisation de cette preuve a porté atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit au respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve, lequel peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie personnelle d’un salarié à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi », déclare la Cour de cassation dans un arrêt du 10 novembre 2021. Il revient ainsi aux tribunaux de procéder à une analyse au cas par cas des faits pour prendre éventuellement en compte une preuve illicite. C’est ce qu’aurait dû faire la cour d’appel de Saint-Denis de La Réunion. Faute de ne pas l’avoir fait, alors qu’elle aurait pu admettre ces enregistrements illicites, en procédant à une balance entre le respect de la vie privée de la personne et le droit de la preuve, la Cour de cassation a cassé et annulé sa décision. La cour d’appel avait constaté que le système de vidéosurveillance destiné à la protection et la sécurité des biens et des personnes dans les locaux d’une entreprise pouvait servir à recueillir et exploiter les informations sur les salariés, alors même que ces derniers et le comité d’entreprise n’avaient été informés de cette dernière finalité.
Une caissière qui travaillait depuis 13 ans pour une pharmacie de Mayotte avait été licenciée pour faute grave sur la base d’un enregistrement de vidéosurveillance. La loi du 21 janvier 1995 autorise en effet l’utilisation de système de vidéosurveillance dans des lieux ou des établissements ouverts au public particulièrement exposés à des risques d’agression ou de vol afin d’y assurer la sécurité des biens et des personnes, comme c’est le cas d’une pharmacie dans le contexte d’insécurité à Mayotte. Les salariés avaient été informés, par une note qu’ils avaient signée, de la mise en place de ce système pour des finalités de sécurité et non de contrôle des salariés.